Blockchain et intelligence artificielle : convergence technologique et réglementaire en vue ?

Par : Daniel Peña Valenzuela

L’écosystème numérique continue de se développer grâce au volume croissant de données créées dans la société de l’information et aux dernières technologies mises au point grâce à une vague d’investissements sans précédent, ainsi qu’aux start-ups technologiques et aux entreprises engagées dans l’innovation. Les politiques publiques tentent de suivre le rythme des progrès technologiques, mais il est difficile de parvenir au consensus nécessaire au niveau gouvernemental. Cependant, la relation entre la technocratie et la prise de décision politique est remise en question par une vision progressiste qui voit parfois un manque de cohérence entre les objectifs du monde universitaire, principalement la recherche dans les universités et les think tanks privés, et les objectifs nationaux. Les lois sur ces questions restent des exemples de multiples projets qui ont échoué dans leur conception et leur développement pragmatique. Les organes législatifs manquent parfois de l’expertise nécessaire pour synthétiser et résoudre les principaux problèmes entre la technologie et le droit.

La blockchain et l’intelligence artificielle (IA) sont deux technologies innovantes et disruptives qui, bien que différentes dans leurs applications et leurs fonctionnalités, peuvent se compléter et se bénéficier mutuellement dans certains contextes. Ces deux technologies sont en constante évolution, et leur convergence a le potentiel de transformer divers secteurs tels que la gestion et l’analyse des données, la cybersécurité et la traçabilité de la chaîne d’approvisionnement mondiale du commerce électronique.

Des solutions sont en cours d’élaboration pour relever les défis liés à l’évolutivité des blockchains, afin d’améliorer leurs performances et de favoriser leur adoption à plus grande échelle. Cela pourrait faciliter la gestion des grandes quantités de données nécessaires à l’entraînement des modèles d’IA.

Pour sa part, la création de normes et de protocoles améliorant l’interopérabilité entre différentes plateformes de chaînes de blocs faciliterait le transfert de données et d’actifs entre les systèmes, ce qui serait bénéfique pour les applications d’intelligence artificielle. Les protocoles et normes tels que l’ERC-20 (Ethereum Request for Comments 20) pour les jetons ou la norme Hyperledger Fabric sont des exemples de normes qui permettent à différentes chaînes de blocs de fonctionner ensemble.

Les mécanismes sont divers ; un pont de chaînes est un mécanisme qui permet le transfert d’actifs ou de données entre différentes blockchains. Cela facilite l’interopérabilité en connectant différents écosystèmes de blockchains et en permettant aux actifs de passer d’une chaîne à l’autre en toute sécurité. De même, des interfaces de programmation d’applications (API) robustes et normalisées peuvent être fournies pour faciliter la communication et l’interaction entre différentes blockchains. Des API bien définies permettent aux développeurs de créer des applications pouvant fonctionner sur plusieurs blockchains.

INTERRELATION TECHNOLOGIQUE ENTRE LA BLOCKCHAIN ET L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Sécurité et confiance :

La blockchain offre un système décentralisé et sécurisé pour le stockage des données. L’immuabilité des enregistrements sur la blockchain contribue à empêcher la manipulation des informations. La blockchain a donné naissance aux contrats intelligents, qui sont des programmes informatiques autonomes qui exécutent automatiquement des accords lorsque certaines conditions sont remplies. L’interopérabilité des contrats intelligents implique la possibilité d’exécuter des contrats sur différentes blockchains, ce qui permet la collaboration et l’automatisation des processus entre les chaînes.

Certaines solutions cherchent à atteindre l’interopérabilité grâce à des mécanismes de consensus qui couvrent plusieurs blockchains. Ces mécanismes permettent à différentes blockchains de s’accorder sur l’état du réseau et la validité des transactions.

L’intelligence artificielle peut utiliser les données sécurisées stockées sur la blockchain pour former des modèles de manière fiable, car les données ne peuvent pas être modifiées une fois qu’elles sont enregistrées sur la blockchain.

L’IA peut contribuer à la formation de consortiums et d’alliances entre différents projets de blockchain et favoriser l’interopérabilité en établissant des règles et des normes communes qui facilitent la collaboration entre les parties concernées.

1. Gestion des données :

La blockchain offre un moyen efficace et sécurisé de gérer et de partager des données entre différentes parties sans avoir recours à un intermédiaire.

L’IA nécessite de grandes quantités de données pour former des modèles efficaces. La blockchain peut être utilisée pour garantir l’origine et l’authenticité des données utilisées dans la formation des modèles d’IA.

L’une des caractéristiques fondamentales de la blockchain est son immuabilité, ce qui signifie qu’une fois les informations enregistrées dans un bloc, elles ne peuvent plus être modifiées. Cela peut poser un problème lorsqu’il s’agit de données personnelles, car toute erreur ou information sensible incorrecte enregistrée initialement ne peut être facilement corrigée.

Bien que les adresses de cryptomonnaie sur une blockchain soient pseudonymes, certains systèmes de blockchain peuvent avoir des fonctionnalités qui permettent de relier les adresses à des identités réelles. La gestion de la confidentialité et de l’anonymat des utilisateurs est essentielle pour protéger les informations personnelles.

L’inclusion de données personnelles sur une blockchain doit être soutenue par le consentement éclairé des individus. Les utilisateurs doivent comprendre comment leurs données seront utilisées et quelles implications l’immuabilité des informations sur la chaîne peut avoir.

La blockchain étant transparente et accessible à tous les participants, il est essentiel de veiller à ce que les données personnelles soient cryptées et protégées. La sécurité des informations doit être une priorité afin d’empêcher tout accès non autorisé.

2. Tokenisation des actifs et contrats intelligents :

La blockchain permet la création de jetons et de contrats intelligents, facilitant la représentation et l’automatisation des accords et des transactions.

L’IA peut tirer parti de la tokenisation pour améliorer l’efficacité de l’exécution des contrats et des transactions, ainsi que de la gestion des actifs numériques.

3. Protection de la vie privée :

La blockchain peut offrir un meilleur contrôle de la confidentialité et de l’accès aux données grâce à des mécanismes tels que le cryptage et la gestion décentralisée des clés.

L’IA peut bénéficier de la sécurité et de la confidentialité accrues offertes par la blockchain lors du traitement de données sensibles pendant l’entraînement des modèles.

4. Incitations et récompenses :

La blockchain permet la création de systèmes de récompense et de jetons qui peuvent motiver la participation et la contribution des utilisateurs.

L’IA peut utiliser ces incitations pour améliorer la collecte et la qualité des données utilisées dans l’entraînement des modèles d’IA.

Ensemble, la combinaison de la blockchain et de l’IA peut contribuer à un écosystème numérique plus sûr, plus transparent et plus efficace, en particulier dans les situations où la confiance, l’intégrité des données et l’automatisation sont cruciales. Ces deux technologies sont en constante évolution, et leur interrelation reste un défi pour les politiques publiques qui ont tendance à fragmenter leur étude et à traiter ces technologies séparément pour les réglementer ou créer des normes juridiques ou éthiques à cet égard.

INTERRELATION ENTRE LA RÉGLEMENTATION JURIDIQUE DE LA BLOCKCHAIN ET DE L’IA

La réglementation juridique et publique de la blockchain et de l’IA peut présenter des similitudes à certains égards, mais il existe également des différences significatives en raison des caractéristiques distinctives de ces technologies.

Réglementation de la blockchain :

Données et confidentialité :

Les réglementations en matière de confidentialité et de protection des données s’appliquent à la fois à la technologie blockchain et à l’IA. Cependant, la nature décentralisée de la blockchain, où les données sont stockées de manière distribuée, peut nécessiter des approches spécifiques pour garantir la confidentialité et la protection des données.

Contrats intelligents :

La réglementation tend à se concentrer sur les contrats intelligents et la validité juridique des transactions effectuées par leur intermédiaire. Elle aborde également les questions de responsabilité en cas d’erreurs dans l’exécution des contrats intelligents qui affectent leur efficacité ou leur applicabilité. Le test des contrats intelligents en tant que messages de données doit également être pris en compte, non plus pour leur authenticité ou leur intégrité, mais pour leur contenu.

3. Tokenisation et cryptomonnaies :

La réglementation traite de l’émission, de la commercialisation et de l’utilisation des jetons et des cryptomonnaies, y compris la prévention du blanchiment d’argent et la protection des investisseurs par le biais de mécanismes de supervision, de surveillance et de contrôle.

4. Interopérabilité et normes :

Il est important que les politiques publiques en matière de TIC adoptent une vision holistique qui permette l’interopérabilité entre différentes blockchains et l’établissement de normes facilitant l’intégration avec les systèmes existants, tels que les applications d’intelligence artificielle.

Réglementation en matière d’intelligence artificielle :

Éthique et responsabilité :

Les réglementations relatives à l’IA mettent l’accent sur l’éthique et la responsabilité. Elles incluent également des aspects tels que la transparence des algorithmes, l’explicabilité des décisions prises par l’IA et l’attribution des responsabilités en cas de résultats négatifs.

Protection des données :

Les lois sur la protection des données peuvent s’appliquer aux technologies d’IA en raison de la collecte, de la compilation et du traitement de grandes quantités d’informations, dont une grande partie sont des données à caractère personnel. L’utilisation de données pour alimenter, former et améliorer les systèmes d’intelligence artificielle nécessite le consentement et l’autorisation des utilisateurs, ainsi que l’établissement de règles sur le traitement des données à caractère personnel conformes aux principes et normes locaux et internationaux en la matière.

Biais et discrimination :

Les réglementations relatives à l’IA traitent des préjugés algorithmiques et de la discrimination dans les systèmes d’IA, en exigeant des pratiques de développement et de formation qui minimisent la discrimination.

Sécurité et transparence :

La réglementation en matière d’IA exige des normes de sécurité pour les systèmes d’IA et la divulgation d’informations sur la présence de systèmes d’IA dans les produits et services.

Développement durable :

Les réglementations relatives à la durabilité et à la responsabilité environnementale pourraient s’appliquer aux systèmes d’IA, en particulier ceux qui consomment de grandes quantités de ressources informatiques.

DOMAINES DE CONVERGENCE RÉGLEMENTAIRE POSSIBLES :

Confidentialité et données :

La blockchain et l’IA traitent toutes deux des données, mais la blockchain est généralement associée à la protection décentralisée des données, tandis que l’IA peut nécessiter des réglementations spécifiques pour le traitement éthique des données et la confidentialité.

Responsabilité et transparence :

Les deux technologies peuvent nécessiter des réglementations qui traitent de la responsabilité en cas d’utilisation abusive ou de résultats imprévus. En outre, la transparence des algorithmes d’IA et la traçabilité de la blockchain peuvent être des thèmes communs.

Accent mis sur l’innovation :

Les réglementations doivent trouver un équilibre entre la protection des utilisateurs et la promotion de l’innovation, en reconnaissant le potentiel transformateur des deux technologies.

En résumé, bien que certains domaines de réglementation puissent se chevaucher, la nature unique de la blockchain et de l’intelligence artificielle peut conduire à des réglementations spécifiques pour relever les défis et saisir les opportunités de chaque technologie. Les autorités réglementaires doivent examiner attentivement l’impact de ces technologies sur la société et l’économie lorsqu’elles élaborent des cadres réglementaires.

LA CYBERSÉCURITÉ DE LA BLOCKCHAIN EST PERTINENTE POUR L’IA

En corollaire à ce qui précède, la cybersécurité est cruciale pour l’intelligence artificielle, car les systèmes utilisant cette technologie traitent souvent de grandes quantités de données sensibles et personnelles. La cybersécurité contribue à protéger ces informations contre les accès non autorisés, le vol de données et les cyberattaques qui compromettent la vie privée des individus. Les modèles d’intelligence artificielle sont vulnérables aux attaques par manipulation, dans lesquelles des adversaires tentent de modifier intentionnellement les données d’entrée afin de tromper le modèle et d’obtenir des résultats erronés. La cybersécurité contribue à garantir l’intégrité des modèles d’IA et la confiance dans leurs résultats. Les cyberattaques peuvent avoir de graves conséquences, en particulier dans les applications critiques de l’IA telles que la cybersécurité, les soins de santé et les transports. Enfin, les systèmes d’IA sont souvent déployés dans des environnements en ligne pour fournir des services en temps réel, ce qui les rend plus vulnérables aux cyberattaques. La cybersécurité est essentielle pour garantir la disponibilité continue des services basés sur l’IA.

SCÉNARIOS PROSPECTIFS POUR L’INTÉGRATION DE LA BLOCKCHAIN ET DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Les scénarios futuristes pour la blockchain et l’intelligence artificielle (IA) sont prometteurs, avec le potentiel de transformer considérablement divers aspects de la société et de l’économie.

• Décentralisation totale : la technologie blockchain devrait jouer un rôle crucial dans la décentralisation des systèmes et des services. Cela pourrait conduire à l’élimination des intermédiaires dans divers secteurs, tels que la finance, l’assurance, l’immobilier et les services professionnels. La décentralisation pourrait également renforcer la sécurité et la confidentialité.
• Économie tokenisée : la création d’actifs numériques tokenisés sur la blockchain pourrait conduire à une toute nouvelle économie, où les tokens représenteraient des actifs physiques et virtuels. Cela pourrait changer la façon dont les biens sont achetés et vendus, ainsi que la façon dont les projets sont financés et font l’objet d’investissements.
• Contrats intelligents avancés : les contrats intelligents sur la blockchain pourraient évoluer pour devenir plus complexes et autonomes. Ils pourraient exécuter des tâches complexes sans intervention humaine, facilitant ainsi des transactions plus sûres et plus efficaces.
• Intégration de l’IA et de la blockchain : la combinaison de l’intelligence artificielle et de la blockchain pourrait déboucher sur des systèmes plus intelligents et plus sûrs. L’IA pourrait être utilisée pour améliorer la sécurité des transactions, prévenir la fraude et fournir des analyses prédictives basées sur les données stockées sur la blockchain.
• Identité numérique souveraine : l’intégration de la blockchain et de l’intelligence artificielle pourrait permettre la création d’identités numériques souveraines et sécurisées. Les individus pourraient avoir un contrôle total sur leurs informations personnelles et décider quelles données partager et avec qui.
• Gouvernance décentralisée : les systèmes de gouvernance basés sur la blockchain pourraient permettre une prise de décision plus démocratique et plus transparente dans diverses organisations. La décentralisation pourrait s’appliquer aux gouvernements, aux entreprises et aux ventes.
• Réseaux neuronaux décentralisés : la possibilité d’exécuter et d’entraîner des réseaux neuronaux de manière décentralisée pourrait conduire à des avancées significatives dans le domaine de l’intelligence artificielle. Cela pourrait améliorer l’efficacité de l’apprentissage automatique et favoriser la collaboration mondiale dans la recherche sur l’IA.